Voir la lettre au format PDF : 2112-20- FELCO – fiches lexique EDUSCOL
Monsieur le Ministre
Notre association d’enseignants d’occitan-langue d’oc, la FELCO, alertée par un de ses adhérents, a pris connaissance d’une fiche pédagogique disponible sur Eduscol (https://eduscol.education.fr/255/lexique-et-culture), concernant l’histoire du français à travers la présentation de l’histoire de certains mots. Nous avons été notamment surpris par la façon dont une de ces fiches situe le mot « voix » dans l’histoire des langues, sous la forme d’un arbre qui nous paraît très discutable (arbre reproduit à la fin du courrier) :
- À un premier niveau, il pose un certain nombre de problèmes de contenu. Est-il indispensable, pour de jeunes enfants, de remonter à la racine indo-européenne, surtout si on ne la présente pas comme telle ? On peut se contenter de l’étymon latin, à condition de le présenter correctement (en linguistique romane, on ne part pas du nominatif VOX mais de l’accusatif VOCE(m). Et pour les développements ultérieurs, à la place de l’arbre étrange présenté, il convient de situer l’ensemble des langues « romanes » sur une même ligne horizontale, puisqu’elles sont toutes les résultats synchrones des évolutions locales du latin sur deux millénaires. Et on distinguera dès lors :
- les langues romanes orientales, italien et roumain, restées avec « voce » les plus proches de l’étymon.
- et les langues occidentales, ibériques (portugais, espagnol « voz »), occitano-romanes (catalan « veu », occitan « votz »), gallo-romane (français « voix »).
Quant à l’anglais « voice », il faut lui faire une place à part, car si le mot en question vient effectivement de la langue d’oïl dans sa variante anglo-normande, l’anglais n’est pas une langue romane et n’a donc pas à figurer au même niveau que les autres.
- Second problème, différent mais encore plus grave à nos yeux, celui de la nomination des langues, en particulier l’occitan.
L’arbre offre deux dénominations : un « provençal » qui renvoie de fait à une seule des variantes identifiées de la langue d’oc (celle de la Provence stricto sensu) et un « occitan » (avec une forme bizarrement confondue d’ailleurs avec celle du catalan…). C’est bien entendu la seule dénomination « occitan » qui est scientifiquement acceptable ; c ‘est au demeurant celle qui est reconnue par le ministère sous la forme « occitan-langue d’oc ».
Nous n’avons pas eu accès à d’autres fiches de même nature. Mais si toutes comportent les mêmes erreurs et imprécisions, il nous semble nécessaire de les reprendre.
Le Congrès permanent de la langue occitane (https://locongres.org/fr) , dont notre association est membre, est tout disposé à fournir sa contribution sur ces questions.
Philippe MARTEL, professeur des universités émérite, membre du CA de la FELCO
Réponse du Ministère le 31-12-21
Madame,
Nous accusons bonne réception de votre message et des remarques qui y sont jointes.
Nous allons corriger, par exigence de précision et de cohérence, la dénomination de l’occitan-langue d’oc dans la fiche mentionnée ; nous procéderons de même pour les autres fiches mises en ligne. Pour ce qui concerne l’arbre à mots, il n’a pas vocation à présenter aux élèves une évolution en diachronie des termes étudiés : les branches ici évoquées ne doivent donc pas être considérées comme étant issues les unes des autres. Nous allons examiner les possibilités graphiques d’évolution pour mieux le suggérer.
Avec mes respectueuses salutations,
David BAUDUIN, Conseiller en charge des affaires pédagogiques, Cabinet du Ministre de l’Éducation Nationale, de la Jeunesse et des Sports |
Philippe Martel, professeur des universités émérite, membre du CA de la FELCO