Audience FLAREP au Ministère de l’Éducation – 21 décembre 2017

Compte-rendu de l’audience

(NB : à la suite, le contenu du document remis par la FLAREP, ainsi que le communiqué public de celle-ci).

La délégation des associations membres de la FLAREP était formée par :

Alà BAYLAC-FERRER : Secrétaire FLAREP – Président APLEC – Catalan
M. Marc BRON : Trésorier FLAREP – Président AES – Franco-provençal / savoyard
M. Bernard CHASLOT – Représente M. Rémi TOULHOAT Président DIV YEZH – Breton
M. Jean-Paul COUCHÉ : Président ANVT – Flamand occidental
M. Thierry DELOBEL : Président FLAREP – Président IKAS-BI – Basque
M. Claude FROEHLICHER – Président Eltern Alsace – Alsacien
Mme Marie-Jeanne VERNY – Représente M. Yan LESPOUX Président FELCO – Occitan

NB : Martine RALU, présidente OC-BI AQUITAINE (occitan), vice-présidente de la FLAREP, n’a pas pu être présente à la réunion à cause de l’annulation de son vol.

M. Gael SIMON – Attaché parlementaire de Paul Molac – Député du Morbihan, accompagnait la délégation.

La réunion commence avec un léger retard (vers 15h10) et se terminera vers 16h30.

Les hôtes du Ministère sont Matthieu LAHAYE, conseiller en charge des langues régionales au cabinet du ministre, Pierre LAPORTE, chef de mission langues régionales de la DGESCO. Plus tard Marie DUTERTRE, conseillère parlementaire au MEN, rejoint la réunion.

Globalement, les participants s’accordent à conclure que l’audience n’a débouché sur aucune avancée concrète. Aucune réponse n’a été apportée aux questions et aux demandes de la FLAREP. Réunion décevante : la délégation espérait une meilleure écoute que lors de l’audience de juillet 2017 : on aurait pu espérer qu’entretemps le conseiller prendrait le temps d’examiner les dossiers… Une fois de plus, nous avons eu le sentiment d’une écoute insuffisante et d’un manque évident de traiter réellement / effectivement des questions et problèmes de l’enseignement des langues régionales.

Matthieu LAHAYE a introduit son propos en précisant que les langues régionales sont à replacer dans le contexte des autres disciplines de l’Éducation nationale : leurs enseignants expriment tous des besoins qui, selon lui, ont autant de légitimité que ceux portés par les représentants des associations de langues régionales. L’enseignement de celles-ci donc se conformer au fonctionnement ordinaire de l’enseignement, cadre de l’écosystème de l’Éducation Nationale. Matthieu Lahaye souligne que l’arrêté modificatif de la circulaire sur la réforme du collège et la création de l’agrégation des langues de France sont des points positifs importants.

Traduction : les langues régionales ne sont pas fondées à demander un traitement de faveur, ni à bénéficier d’un soutien particulier de la part du Ministère.

Remarque : L’arrêté modificatif de la circulaire collèges et la création de l’agrégation datent de l’ancien gouvernement. Le nombre de postes attribué à l’agrégation limite singulièrement l’intérêt de la mesure à son caractère symbolique, important, certes, mais insuffisant.

Le conseiller a surpris en résumant les difficultés de l’enseignement des langues régionales à se développer et à être reconnues par l’administration à un manque de « rayonnement » qui obérerait ainsi l’attractivité de ces enseignements. Comme lors de la réunion de juillet 2017, il nous a été conseillé de travailler davantage la dimension pédagogique et des contenus pour séduire un plus large public. M. LAHAYE illustre son propos en évoquant les enseignements facultatifs de langues anciennes et suggère (sérieusement) un rapprochement avec le latin et le grec. Il insiste sur la nécessité (par qui ? le milieu associatif ?) de valoriser les savoir-faire pédagogiques comme moyen de rayonnement.

Traduction : la situation, les problèmes et dysfonctionnements des langues régionales n’incombent pas aux responsables du Ministère, mais aux seules langues elles-mêmes qui doivent manquer d’attrait et pâtissent d’un déficit d’image dont elles sont seules responsables, ainsi que ceux qui les enseignent.

Sur le problème de manque de sécurité réglementaire et d’interprétations à la baisse des instructions ministérielles ou du non-respect des circulaires : le conseiller insiste sur l’arrêté modificatif de la circulaire de la réforme du collège qui a permis, à son sens, de rétablir la position des langues régionales au sein des enseignements. Pour lui, la circulaire de 2017 définit un cadre suffisamment clair et cohérent pour l’enseignement des langues régionales.

Pas de réponse à la mention réitérée des dysfonctionnements sur le terrain et du non-respect des directives ministérielles (tenue aléatoire des CALR, baisse des heures en sections bilingues, absence de plans de développement…). Le conseiller prend note et dit comprendre nos remarques sur les pratiques locales divergentes des directives nationales. Et il semble reconnaitre, sans rien commenter, que la non-application des textes par les cadres intermédiaires (recteurs, DASENs, chefs d’établissement) pose un problème.

Lorsque la délégation expose le besoin d’une loi pour sécuriser l’enseignement des langues régionales, la conseillère parlementaire, péremptoire, s’interroge sur l’utilité d’une loi qui n’est après tout qu’un autre niveau de norme différente de la réglementation.

Pas de réponse sur la question de l’inégalité de traitement des langues régionales en fonction du degré de pression sociale.

Notre interlocuteur souligne par ailleurs qu’il est hors de question que des moyens spécifiques soient dévolus par le Ministère à l’enseignement des langues régionales : chaque académie reçoit une enveloppe globale en fonction de la démographie scolaire ; les choix d’utilisation de cette dotation lui reviennent et il est hors de question que ces choix soient dictés par le Ministère. À la remarque que les académies où existent des langues régionales doivent prendre en charge l’enseignement de celle-ci en sus de leurs obligations communes, il est répondu que certaines académies ont besoin de moyens pour enseigner par exemple le chinois ou l’arabe, en fonction des populations locales. Notons que dans la même académie l’enseignement d’une langue régionales devrait pouvoir être compatible avec celle des langues évoquées…

Nous n’obtenons pas non plus d’explication sur le refus constant depuis plus de vingt ans d’inclure le flamand occidental et la franco-provençal / savoyard sur la listes des langues régionales donnant droit à être enseignées.

Question de la bivalence des professeurs de LR :

Le conseiller demande quelle est notre lecture et quelles sont nos attentes sur la question de la bivalence des professeurs certifiés de langues régionales (difficultés évoqués par la FELCO dans ses documents, en particulier lors de l’affectation d’enseignants sur plusieurs établissements).

Alà Baylac Ferrer rappelle que la bivalence du CAPES de langue régionale a été pensée lors de la création du concours pour compléter le service ne totalisant éventuellement pas 18 h hebdomadaires par l’enseignement d’une autre discipline. Ce dispositif spécifique devait permettre – au moins pour certaines langues – d’affecter les certifiés sur un seul établissement et, pour d’autres, de limiter le nombre de sites d’affectation, et d’ajuster le volume d’enseignement de langue régionale aux besoins. Nous réitérons qu’il est impossible de mettre en place un enseignement normal et consolidé lorsque les enseignants courent littéralement d’un établissement à l’autre.

Marie-Jeanne VERNY évoque l’insuffisance de postes aux concours (CAPES et agrégation), en particulier sur l’espace occitanophone où les carences en enseignants sont bien plus importantes que dans les autres régions (voir dossier remis par la FELCO : http://www.felco-creo.org/la-felco-membre-de-la-delegation-flarep-au-ministere-le-21-decembre-2017/). Les volumes de postes proposés au CAPES correspondent actuellement à une échelle de petites régions linguistiques ; sûrement pas à plus de 30 département et 8 académies.

Thierry DELOBEL demande que les évaluations des résultats de l’enseignement bilingue –qui avait été pratiquée il y a plusieurs années par les inspections académiques– soient reprises par l’Éducation Nationale de manière à valoriser des modalités d’enseignement innovantes et performantes. Matthieu LAHAYE prend note.

Le président de la FLAREP demande s’il est envisageable que la Fédération puisse être reçue par le ministre : ce serait une manière de manifester l’intérêt du nouveau Ministère – et, au-delà du gouvernement – pour l’enseignement des langues régionales. Le conseiller prend note.

En conclusion, nous réitérons les points sur lesquels nous souhaitons obtenir une réponse et aboutir dans les semaines qui viennent à des échanges et à un travail en collaboration avec le Ministère (ces éléments feront l’objet d’un courrier adressé par la FLAREP au Ministre, dans les jours qui viennent) :

  1. Réunir un Conseil ministériel des langues régionales (CMLR) annuellement, sur le modèle des CALR (conseils académiques des langues régionales) ;
  2. Publier un rapport annuel sur l’enseignement des langues régionales ;
  3. Élaborer un plan de développement de l’enseignement des langues régionales ;
  4. Adopter une loi sur l’enseignement bilingue ;
  5. Être consultés sur les propositions de réforme du bac et des enseignements du lycée ;
  6. Travailler en concertation avec le cabinet du ministre à la publication d’une nouvelle plaquette (réactualisation de la plaquette ministérielle Les langues régionales à l’école de 2013) pour la rentrée 2018 ;
  7. Une nouvelle réunion est demandée pour faire le point sur les avancées à la fin de l’année scolaire 2017-2018.

Document communiqué au conseiller en début de réunion (Dossier FLAREP)

CONSTAT

  • Le bilinguisme scolaire a fait ses preuves depuis plusieurs décennies, en France et de par le monde (Luxembourg, Québec, Catalogne…) :
    • pédagogies innovantes et motivation des élèves et familles
    • meilleurs résultats scolaires, en particulier en mathématiques et français
    • prédisposition à l’acquisition de langues et au plurilinguisme
    • ouverture à la diversité
  • Nous soulignons plusieurs points positifs et progrès:
    • Planification du développement de l’enseignement bilingue (OPL Basque, protocole Rectorat de Rennes, Plan de formation avec Collectivité corse)
    • Création et mise en fonctionnement de l’OPL Catalane, OPL Occitane avec participation de l’État
    • Actualisation de la Circulaire sur les langues régionales
  • Nous déplorons de trop nombreux dysfonctionnements au sein même de l’Éducation Nationale, dysfonctionnements qui compromettent la bonne marche de l’enseignement des langues régionales et du bilinguisme scolaire :
    • Cadre réglementaire insuffisant
    • Non-respect des orientations ministérielles : professeurs non affectés, circulaires non appliquées (CALR), moyens académiques détournés, réforme du collège interprétée…
    • Disparités et différences de traitement entre académies et entre langues (formation des PE bilingues, moyens académiques utilisables pour les LR, formations universitaires, postes CAPES et agrégation, flamand et savoyard…)

BESOINS

Il est indispensable de :

  • sécuriser le cadre réglementaire et législatif de l’enseignement des langues régionales et du bilinguisme
  • fixer des objectifs quantitatifs et qualitatifs de développement

DEMANDES et PROPOSITIONS

  1. Réunir un Conseil ministériel des langues régionales (CMLR) annuellement, sur le modèle des CALR (conseils académiques des langues régionales)
  2. Publier un Rapport annuel sur l’enseignement des langues régionales
  3. Élaborer un Plan de développement de l’enseignement des langues régionales
  4. Adopter une loi sur l’enseignement bilingue
    • Fin 2018

Nous souhaitons, dans les semaines qui viennent

  • Travailler avec le MEN à la publication d’une plaquette actualisée sur les langues régionales à l’école (modèle Peillon 2013) ; objectif : rentrée 2018
  • Maintenir un contact régulier avec le conseiller chargé des langues régionales et la direction du cabinet du MEN afin de collaborer à la concrétisation des mesures proposées ci-dessus et à l’échange d’informations.
  • Proposition de nouvelle rencontre en juillet 2018

[Contrairement aux précédentes réunions avec la FLAREP, le conseiller indique qu’il ne sera pas possible de faire une photo de la délégation avec les personnels du ministère, les nouvelles instructions sur la communication ne prévoyant plus cette possibilité…]

Les représentants de la FLAREP reçus au Ministère (de gauche à droite) : Claude Froehlicher (Eltern Alsace), Marc Bron (Ass. Enseignants de Savoyard), Gael Simon (attaché parlementaire de Paul Molac), Marie-Jeanne Verny (FELCO), Alà Baylac Ferrer (APLEC), Thierry Delobel (Ikas-bi), Bernard Chaslot (Div Yezh Breizh), Jean-Paul Couché (ANVT).

Audience des représentants des Langues régionales dans l’enseignement public au Ministère – 21-12-2017.

Communiqué de la FLAREP

LA FLAREP DÉNONCE LES DYSFONCTIONNEMENTS ET DEMANDE UN PLAN DE SÉCURISATION ET DE DÉVELOPPEMENT

La FLAREP  a été reçue en audience jeudi 21 décembre à Paris par le conseiller chargé des langues régionales au Ministère de l’Éducation Nationale pour faire un point de la situation au terme de six mois de gouvernement « en marche ». La Fédération a dénoncé les différences de traitement entre langues ainsi que les nombreux dysfonctionnements et irrégularités qui affectent le bon fonctionnement de l’enseignement des langues régionales et du bilinguisme au sein de l’enseignement public (non respect des circulaires par rectorats, DASEN et chefs d’établissements, professeurs recrutés non affectés ou n’enseignant pas leur discipline, collèges et lycées sans langue régionale, réduction des heures de langue régionale en section bilingue, absence de plan de développement…). La réunion s’est tenue en présence de l’attaché parlementaire du député breton Paul Molac, Gael Simon, et de Pierre Laporte, chef de mission langues régionales de la DGESCO.

Afin de concrétiser les déclarations favorables aux langues du candidat Emmanuel Macron, la FLAREP propose quelques mesures précises : réunion annuelle d’un conseil ministériel des langues régionales et publication d’un rapport annuel sur l’enseignement des langues régionales, établissement d’un plan de développement pour l’enseignement des langues régionales pour la durée du mandat présidentiel, élaboration d’une loi sur l’enseignement bilingue qui garantisse l’égalité d’accès de tous les élèves à une offre publique de bilinguisme à l’école. Les représentants des langues régionales se sont montrés disposés à travailler en concertation avec le Ministère pour résoudre les problèmes, prévenir les dysfonctionnements et doter l’école du 21ème siècle des outils indispensables à une éducation publique plurilingue.

La FLAREP a souligné les progrès obtenus en 50 ans par l’enseignement des langues régionales et le bilinguisme, tout en regrettant leur lenteur. La Fédération espère du Ministère le passage à une nouvelle étape : après le volontarisme initial, l’Éducation nationale doit passer à une phase de développement, de normalisation du bilinguisme et de garantie de l’égalité de traitement entre langues (alsacien/francique, basque, breton, catalan, corse, créoles, flamand occidental, franco-provençal/savoyard, occitan). Les associations ont demandé au Ministère de travailler en concertation pour améliorer les bonnes pratiques, le rayonnement des langues régionales au sein de l’Éducation nationale. Elles comptent pour celà sur le soutien de nombreux députés. Contact : www.flarep.com.

 

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