Lettre du CREO Toulouse à la présidente de la région OPM

M. Emmanuel Isopet, Président du CREO Tolosa @ : creotoulouse@gmail.com

 le 22 avril 2020

Madame Carole Delga

Présidente de la Région Occitanie Pyrénées-Méditerranée

 

Objet : enseignement de l’occitan

Madame la Présidente,

Dans ces moments difficiles pour notre pays et pour la Région que vous présidez, permettez-nous tout d’abord d’espérer que vous-même et vos proches sont le moins affectés possible.

Nous vous remercions de l’énergie, de l’efficacité et de l’humanité avec laquelle, avec vos services, vous répondez aux préoccupations de nos concitoyens.

Dans un premier temps, nous voudrions vous remercier très chaleureusement, vous-même et les présidents de groupes de votre majorité, du vœu adopté le 5 mars dernier concernant l’enseignement public de l’occitan, dont nous avons informé l’ensemble de nos collègues. Cette prise de position, dans une période où la politique pour l’enseignement de l’occitan menée depuis 30 ans dans l’académie de Toulouse est remise en cause, les acquis obtenus reniés, les menaces à un niveau jamais atteint, ne peut que donner du baume au cœur aux collègues.

Les attaques menées l’an dernier par les services du Rectorat contre l’enseignement de l’occitan s’ajoutent aux reculs ministériels depuis 2004. Reculs qui se sont accentués depuis deux ans avec la réforme du lycée et du baccalauréat qui menace de disparition, n’ayons pas peur des mots, l’enseignement de l’occitan.

Cette année a vu ainsi la fermeture de cet enseignement dans 10 lycées de notre académie et la baisse dramatique de 20 % des effectifs. Ceci n’est qu’un début puisque la rentrée prochaine verra, par effet mécanique, le nombre d’élèves présentant cette langue en terminale chuter de moitié. Il est donc inéluctable qu’a ce rythme, si rien n’est fait pour l’éviter, la fin de l’enseignement de l’occitan dans les lycées publics soit proche.

Lors de l’audience que vous nous aviez accordée en mars 2019, nous pouvons témoigner de la connaissance dont vous faîtes preuve sur ce dossier. Vous avez parfaitement compris que la situation actuelle résulte en grande partie de certains points de la réforme du lycée qui réduit l’offre d’enseignement et la dévalorise. Ces mesures mortifères viennent s’ajouter à des décisions néfastes qui avaient été prises ces dernières années dans notre académie.

Nous vous demandons donc de bien vouloir, une fois de plus, peser de tout votre poids auprès des instances qui peuvent inverser la tendance.

Auprès du Ministre de l’Éducation nationale, tout d’abord, afin qu’il admette enfin les graves dégâts collatéraux provoqués par la réforme et qu’il s’engage à mettre en œuvre rapidement les réajustements indispensables :

– l’égalité de l’option facultative (LCV) avec l’enseignement de Langues et Cultures de l’Antiquité,

– la généralisation de la LVB occitan dans tous les lycées où l’enseignement de l’occitan est proposé,

– possibilité de cumuler l’enseignement de spécialité langues régionales (LLCR) avec un enseignement de spécialité langues étrangères,

– des points de bonification pour les élèves suivant l’enseignement d’une discipline non linguistique en occitan (valorisé actuellement d’une simple mention écrite),

– le rétablissement de la possibilité de présenter l’occitan au baccalauréat en candidat libre telle qu’elle existait depuis la loi Deixonne de 1951,

– la possibilité de présenter l’option en section technologique (supprimée en 2010).

– enfin qu’à titre transitoire, il soit permis aux élèves de première, qui ne suivent pas d’enseignement d’occitan cette année, de présenter cette langue au Baccalauréat l’année prochaine. En effet, un certain nombre d’entre eux, qui n’étaient pas informés des subtilités de la réforme mais qui ont des acquis dans cette langue, pensaient pouvoir se présenter en candidat libre. Or cela n’est plus possible.

Auprès du Rectorat de l’académie de Toulouse, également, pour qu’il s’engage résolument dans une politique académique coordonnée et concertée avec les acteurs de terrain en faveur du développement de l’enseignement de la langue et de la culture occitane. Un premier signe encourageant nous a paru être donné lors du dernier CAEOC (Comité académique pour l’enseignement de l’occitan), mais il est aujourd’hui nécessaire et urgent que la déclinaison académique de la Convention État-Région signée en février 2017 soit enfin signée et accompagnée de la mise œuvre d’une politique volontariste. Cela commence par :

– le développement des sections bilingues, arrêté l’an passé et dont certaines sont menacées (Aillot-Castres).

– assurer la continuité école-collège-lycée. Ce n’est actuellement pas le cas partout ; à titre d’exemples, cette continuité n’est plus assurée en lycée à Muret (31) depuis l’an passé, n’a jamais été mis en place à Grisolles (82) et est incertaine à Montauban. La réforme du lycée devrait pourtant faciliter le suivi du bilinguisme et l’enseignement d’une DNL.

– permettre que l’enseignement de spécialité langues régionales (LLCR) soit plus largement accessible (il n’est ouvert que dans deux établissements de l’académie).

– que partout où un enseignement d’occitan est proposé il le soit en LVB et LVC.

– que cette politique volontariste s’accompagne de la sanctuarisation des moyens à hauteur d’au moins 50 ETP comme Monsieur le Recteur l’a annoncé en CAEOC.

– que dans chaque département des Conseillers Pédagogiques occitanophones puissent soutenir cette politique. Nous vous rappelons que ce n’est plus le cas dans les départements d’Ariège, du Gers et du Lot.

Pour toutes ces questions, Madame la Présidente, nous avons besoin de votre soutien. Les enseignants d’occitan, les élèves qu’ils forment, les familles concernées ne vous demandent pas d’abord un investissement financier, ils vous demandent surtout un soutien politique pour que le service public puisse donner à tous les enfants qui vivent ici, d’où qu’ils viennent, le droit de connaître la culture de la Région où ils vivent.

Nous vous remercions de l’attention que vous porterez à nos demandes et restons à votre disposition et à celle de vos services, pour répondre à toutes vos sollicitations.

Soyez assurée, Madame la Président de nos plus respectueuses salutations

Pour le CREO de l’académie de Toulouse

Emmanuel Isopet

Président

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