15-02-22- Le CREO Lengadòc répond au SNUDI – FO 48

 Nous avons pris connaissance de votre prise de position quant à l’enseignement de l’occitan en date des 4 et 5 mai réitérée le 21 janvier dernier (voir sur notre site http://www.felco-creo.org/20-01-22-courrier-du-snudi-fo-lozere-a-propos-du-groupe-de-travail-occitan/) avec un intérêt teinté d’un certain étonnement face à un certaine absence de sens de la nuance dans l’analyse qui s’y exprime. Nous nous permettons donc quelques remarques, car il nous semble important de maintenir le dialogue.

Nous laissons de côté votre dénonciation de la nature non statutaire du comité occitan, car il s’agit là d’une situation, celle d’un département, sur laquelle nous n’avons pas à nous prononcer : à vous donc de régler cela avec votre hiérarchie. Cela dit, pourquoi ne pas demander que ce comité devienne justement statutaire, ce qui vous permettra d’y participer et de faire valoir vos arguments.

Nous laissons aussi de côté votre affirmation selon laquelle les classes monolingues seraient également des classes allophones : nous ignorions que la Lozère en était arrivée au stade de certaines écoles du 93, qui posent et effectivement des problèmes, que la célébration du monolinguisme français ne règlera d’ailleurs pas à elle toute seule, malgré son fort contenu patriotique.

Nous préférons nous concentrer sur certains points qui nous paraissent fondamentaux.

  • Vous parlez de langue unique. Pour vous, donc, un Vrai Français ne saurait parler d’autre langue que le français. Nous en concluons que pour vous, l’occitan, parlé en Lozère depuis un certain nombre de siècles, est une langue étrangère, et que nous sommes, à notre façon, des allophones. Vous voudrez bien constater que nous vous écrivons en français, afin d’être mieux compris, du moins nous l’espérons. Parce que, pour nous, le français est la langue commune qui permet de communiquer partout sur le territoire national. Et nous vous invitons, dans un français aussi correct que nos faibles compétences de « patoisants » nous le permettent, de réfléchir à la différence entre langue commune et langue unique. Car cette différence existe.
  • Rassurez-vous, nous n’allons pas exiger de vous une sollicitude excessive à l’égard de l’occitan. Nous savons combien il est facile d’accepter la disparition d’une langue qu’on ne parle pas et d’une culture dont on ignore tout, l’école de la bourgeoisie n’ayant jamais accepté que les langues de France fassent partie de la culture nationale. Vous avancez, à propos du bilinguisme, l’idée qu’il ne vaut que dans la mesure où la langue enseignée est présente dans le milieu fréquenté par les élèves. Il nous semble que la Lozère fait précisément partie des endroits où la présence de l’occitan est patente. À condition, bien sûr, qu’on consente à l’entendre. Entre nous, qui est le plus particulariste, ou communautariste : celui, qui, comme nous, considère qu’occitan et français peuvent cohabiter, et se nourrir l’un l’autre, ou celui qui refuse, au nom de ses propres dogmes rigides, que seule la langue que lui-même juge légitime a droit de cité dans notre République, surtout si c’est la seule qu’il parle ? Là encore, nous vous suggérons de prendre le temps de la réflexion.
  • Et, même si nous n’avons pas à vous demander d’afficher vos préférences politiques (ne serait que parce que nous savons qu’à FO elles peuvent être multiples), nous notons, sans en tirer de conclusions particulières, que votre refus de l’occitan est somme toute assez bien partagé dans certains secteurs de l’opinion. C’est le cas par exemple, dans les débats parlementaires sur cette question) de ceux des chevènementistes qui n’ont pas encore glissé vers le Rassemblement National. Et, somme toute, s’il la connaissait, M. Blanquer ne désapprouverait pas votre position et votre culte du français unique : sa politique en matière de langues régionales est suffisamment éradicatrice pour combler tous vos vœux. Même, si moins franc que vous, il se garde bien de le dire publiquement.
  • Nul doute que, comme vous, il regrette que l’enseignement de ces langues, y compris sous la forme du bilinguisme, soit prévu dans l’école de la République par des textes que nous trouvons certes modestes mais qui n’en existent pas moins. Seulement, c’est comme ça : ni lui ni vous n’y pouvez rien. Le propre des textes règlementaires (et depuis le 21 mai 2021, législatifs), c’est qu’ils sont faits pour être appliqués. Il est donc assez normal que des sites bilingues puissent être crées, conformément aux textes, même en Lozère. Nous ne vous obligerons pas, cela dit, à y mettre vos propres enfants, si vous en avez, cet enseignement étant facultatif. Mais vous voudrez bien comprendre que nos collègues formés à l’enseignement de l’occitan fassent leur possible pour le développer, et soient peu disposés à recevoir des leçons de qui que ce soit quant aux obligations qui sont les leurs en tant que fonctionnaires de la République, et quant à leur mission émancipatrice en tant qu’enseignants. Nous regrettons donc qu’ils ne puissent compter, en Lozère, sur votre soutien, et nous les laisserons en tirer les conséquences qu’ils voudront quant au choix de leur appartenance syndicale.
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