07-07-22 – compte rendu de l’audience FELCO – Ministère

Une rencontre en visioconférence a eu lieu le 7 juillet 2022, de 16 h. à 16 h 55 entre une délégation de la FELCO et deux conseillers auprès du ministre de l’Éducation nationale : Mme Benetti, conseillère du Ministre Ndiaye chargée, entre autres, des langues régionales, et M. Leroux, conseiller aux affaires pédagogiques et aux savoirs fondamentaux.

Après l’audience, un dossier préparatoire a été adressé à nos interlocuteurs, dossier dans lequel lequel sont évoquées de nombreuses questions qui n’ont pu trouver place lors de l’entretien : 2207-07- Audience-FELCO-Ministère-1

La délégation de la FELCO était ainsi composée :

  • Olivier Pasquetti, président (académie de Nice),
  • Virginie Lago (académie de Toulouse), co-secrétaire,
  • Marie-Jeanne Verny (académie de Montpellier), co-secrétaire,
  • Bruno Duranton (académie de Toulouse), co-trésorier,
  • Laure Bonnet (académie de Clermont-Ferrand), co-trésorière,
  • Philippe Martel (académie de Montpellier), membre du Conseil d’Administration, ancien président.

Le président Olivier Pasquetti prend la parole pour remercier les représentants du ministère d’avoir accepté cette rencontre, qu’ils présentent eux-mêmes comme une prise de contact avant d’autres rendez-vous. Il y voit le signe que s’ouvre peut-être une nouvelle période, rompant avec le manque de considération dont nos enseignements ont trop longtemps souffert, en particulier sous le précédent quinquennat.

Il définit ensuite brièvement le cadre général de l’entrevue telle que la FELCO la conçoit : après le moment d’espoir qu’a représenté l’adoption de la loi Molac par une large majorité transpartisane, il souhaite faire le point sur la situation de l’enseignement de l’occitan marquée par un certain nombre de problèmes structurels :

  • rupture d’égalité républicaine entre les moyens attribués aux diverses langues régionales et aux diverses académies de l’aire de la langue d’oc,
  • effets négatifs des réformes récentes,
  • absence de continuité entre les différents niveaux d’enseignement, du primaire au supérieur.

Autant d’éléments qui sont source de réelles souffrances et parfois de démotivation pour les personnels engagés dans l’enseignement de l’occitan dans le public. Il évoque des pratiques managériales dépourvues d’humanité qui s’ajoutent au manque de considération quant à la discipline qu’enseignent nos collègues.

La souffrance dans laquelle se trouvent un grand nombre de collègues est la conséquence de ces problèmes structurels. En accord avec nos interlocuteurs, il passe ensuite la parole aux membres de la délégation pour la présentation de chacun des niveaux de l’enseignement de l’occitan.

Laure Bonnet présente la situation à l’école primaire, sous les diverses formes que l’enseignement de l’occitan prend à ce niveau (de la sensibilisation à l’enseignement bilingue à parité horaire). Elle souligne l’inégalité entre académies qui prévaut – en particulier pour les académies du nord de l’espace occitan, dont celle de Clermont, la sienne :

  • Inégalité entre académies où l’enseignement bilingue existe et celles où il est rare ou absent.
  • Inégalité dans le réseau des conseillers pédagogiques départementaux, des maîtres formateurs et des chargés de mission d’inspection.
  • Inégalité en ce qui concerne l’existence et la portée des conventions État-Région pour l’enseignement de la langue, d’une région à l’autre.
  • Inégalité dans les moyens mis à la disposition du développement de cet enseignement (question des heures fléchées, indispensables pour éviter la concurrence, par exemple entre maintien des écoles rurales et postes d’enseignement de l’occitan).

Bruno Duranton intervient ensuite pour ce qui concerne le collège :

  • Il souligne l’intérêt – qui serait conforme à l’article 7 de la loi « Molac » – de proposer une initiation généralisée à l’occitan an classe de 6ème. Cette initiation permet à la fois de faire prendre conscience aux élèves de l’existence de la langue et de sensibiliser ceux qui ensuite suivront un cursus dans cette langue. Il demande que cette initiation généralisée soit dans un premier temps systématisée dans tous les établissements qui proposent un enseignement dans leur carte des formations.
  • Il déplore le fait que sur le terrain l’option « langue régionale » ne soit pas toujours cumulable avec d’autres options, malgré les textes qui prévoient la possibilité de ce cumul, et qu’ainsi de très nombreux élèves soient exclus de fait de l’option occitan.
  • Lui aussi pointe la nécessité d’heures fléchées indispensables face à des DGH contraintes. Il ajoute, que dans certains cas, les chefs d’établissement choisissent de regrouper plusieurs niveaux faute de pouvoir (ou de vouloir) accorder les heures correspondant spécifiquement à chacun de ces niveaux. Il rappelle que dans de très nombreux établissements l’option occitan est ainsi discriminée, l’horaire légal n’étant pas assuré.
  • Il souligne la difficulté dans laquelle se trouvent des collègues obligés d’assurer des cours dans deux, trois, voire cinq établissements pour répondre à la demande ou pour pouvoir assurer un temps plein. Ces services partagés multiples contribuent également à l’épuisement physique et moral des collègues.
  • Il pose enfin le problème de l’information des familles : parfois les dossiers d’inscription ne mentionnent même pas la possibilité de suivre des cours d’occitan dans l’établissement.

Virginie Lago prend le relais pour aborder la situation dans les lycées.

  • Elle note comme un point positif la récente revalorisation du coefficient affecté au bac à l’option langue régionale (LVC) et l’extension de cette option à l’enseignement technologique : des revendications anciennes de la FELCO ont ainsi été satisfaites.
  • Elle n’en souligne pas moins les effets néfastes pour l’enseignement de l’occitan de la réforme du Lycée et propose des pistes existent pour limiter ces effets :
    • permettre le cumul entre un EDS de langue régionale et un EDS de langue vivante étrangère,
    • restaurer le caractère bonifiant de l’épreuve de LVC, qui caractérisait depuis la loi Deixonne l’épreuve orale au baccalauréat. Cette perte a eu une répercussion immédiate vis-à-vis des familles et des lycéens sur l’attractivité de l’occitan au lycée,
    • étendre la possibilité d’accès à un enseignement de l’occitan à l’ensemble des filières professionnelles.

Marie-Jeanne Verny présente la situation dans l’enseignement supérieur et au niveau des concours :

  • Elle signale l’impact de la dégradation de la situation au Lycée sur le vivier d’étudiants susceptibles de choisir un cursus de licence en langue régionale, puis de se présenter aux concours du primaire (CRPE) et du secondaire (CAPES et agrégation).
  • Elle souligne, pour le supérieur comme pour les autres niveaux, l’inégalité entre les académies : seules 2 universités (Toulouse et Montpellier), offrent un cursus complet, de la licence au doctorat, là où il y a encore quelques années de tels cursus existaient dans quatre autres universités.
  • Quant aux INSPes, la situation n’y est pas meilleure : là encore seuls quelques sites offrent une formation en langue régionale, avec un nombre de formateurs réduit.
  • Pour ce qui concerne les concours, elle relaie la revendication de la FELCO concernant le rétablissement d’une épreuve de langue régionale pour le CRPE général, en complément du CRPE spécial sanctionnant une aptitude à l’enseignement bilingue.
  • Pour ce qui est du CAPES, il conviendrait d’élargir l’éventail des valences actuellement possibles, soit à des langues non encore prises en compte (l’italien dans l’académie de Nice par exemple) soit à des disciplines scientifiques comme cela est possible pour le CAPES de breton. Il est nécessaire aussi d’augmenter le nombre des postes annuels qui a connu une baisse drastique en 25 ans (d’une moyenne de 15 postes à 4 pour 32 départements), avec les conséquences que nous connaissons sur l’effectif d’enseignants en poste, et, par voie de conséquence sur les effectifs d’élèves. La même revendication vaut pour la récente agrégation : il est indispensable d’assurer une session, externe ou interne, chaque année, avec plusieurs postes ; il conviendrait aussi, au passage, de rendre publics les programmes du concours dès le printemps, comme pour les autres agrégations, non à l’automne…

***

À la suite de ce tour d’horizon, les conseillers prennent la parole pour indiquer que récemment nommés ils découvrent la problématique des langues régionales. Ils posent ensuite quelques questions :

  • En ce qui concerne le premier degré, M. Leroux demande qu’on lui fasse remonter les départements qui connaissent des difficultés, tout en indiquant que dans les zones rurales il peut être difficile de maintenir des écoles connaissant un flux d’élèves trop réduit. Il demande également des chiffres concernant conseillers pédagogiques et maîtres formateurs, et évoque la possibilité de mise en place de formations interdépartementales.
  • Mme Benetti indique, pour répondre à la question de l’inégalité entre académies, qu’il y a de fait autant de politiques que d’académies et de départements, sans pour autant évoquer la possibilité d’améliorer la situation.
  • Elle demande des précisions sur le nombre d’élèves et d’enseignants concernés.
  • Elle note l’importance de faire quelque chose en matière d’information aux familles.
  • Mais elle semble dubitative quant à la possibilité d’assurer partout la continuité entre les différents cycles dans un même bassin. Elle considère par ailleurs que si la demande des parents se manifeste volontiers tant qu’il est question du primaire, il n’en va plus de même pour les niveaux supérieurs, où il faut convaincre les parents prescripteurs de l’intérêt de suivre un cursus en langue régionale face à la concurrence d’options perçues comme plus rentables ; bref, il faut les convaincre qu’il y a là « une plus-value, pas un supplément d’âme ». (sic).

Madame Verny lui rétorque qu’il est difficile que des parents sollicitent un enseignement de l’occitan quand ils ignorent que cela est possible, comme c’est encore le cas dans de nombreux endroits. Madame Verny insiste sur la politique d’offre qui doit être celle de l’Éducation nationale, pour les langues régionales comme pour les autres disciplines

  • Mme Benetti déclare ne pas partager l’analyse de la FELCO quant à la dégradation de la situation dans les lycées, évoquant l’introduction, dans la dernière réforme, d’Enseignements de spécialité dotés de coefficients valorisants, ou la possibilité de passer le grand oral en partie en langue régionale[1]
  • Elle prend note en revanche de la demande d’une possibilité de cumul entre EDS ou entre options.
  • Pour ce qui concerne la demande d’une restauration de l’épreuve bonifiante en LVC, elle souligne que le contrôle continu permet de mesurer l’implication des élèves dans l’apprentissage de la langue.

La rencontre se clôt à la suite des derniers échanges autour des points soulevés. La délégation assure ses interlocuteurs de l’envoi prochain d’un dossier complet faisant le point sur toutes les questions évoquées. Et l’accord se fait sur l’idée que d’autres rencontres (pourquoi pas avec M. Le ministre lui-même ?) suivront cette première prise de contact.

[1] Note de la FELCO : se gardant bien au passage de mentionner qu’il n’existe que 5 EDS pour l’ensemble de l’espace occitan…

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